Gulmarg
« Le décor est campé sobrement, qui joue avec finesse sur la carte postale de sommets enneigés à peine entrevus, dans un camaïeu de bleus et blancs, entre un large déploiement de nuages et une vue en surplomb à la limite de la topographie. Car le propos n’est en rien celui du paysage mais celui des gens qui viennent là et jouent chacun leur rôle. D’un côté les touristes, de l’autre les travailleurs, de façon très clairement marquée par le mode de traitement et la distance choisie. Entre portraits et situations, les touristes amènent souvent un sourire, voire un rire franc – ce n’est pas si fréquent en photographie – . Pour les travailleurs, si l’on excepte leur présence dans des moments de l’activité qui se jouent de l’anecdote, le choix du portrait est très affirmé. Des portraits posés, frontaux, qui réclament le regard, en lumière ambiante, sur le lieu de travail. Ici, plus aucune anecdote. C’est loin, au bout du monde. Mais il n’y a plus aucun exotisme, simplement des relations sociales aujourd’hui et un choix dans l’attention aux personnages qui se marque autant par la distance choisie que par une façon d’inventorier, de mettre les choses à leur place, de ne pas se laisser distraire par ce qui pourrait être séduisant mais n’est pas essentiel. C’est ramassé, sans bavardage, comme une mise à plat. C’est vraiment de la photographie à l’œuvre dans le champ du documentaire, avec l’exigence et la modestie que cela exige. Cela n’a donc rien à voir – ou si peu – avec Gulmarg. C’est simplement le Gulmarg de Marion Gambin. »

 

Christian Caujolle